ALCHIMIE
ALLEMAGNE
ALLEMANISME
ALPINA
ALSACE-LORRAINE
AMIS DE LA LIBERTE



ALCHIMIE
Alchimi.gif - 19342,0 K Sur ce thème, la controverse est loin d'être close. L'alchimie, voie de la sagesse initiatique pour certains, ne serait pour d'autres « science » occulte que par abus de langage et conception hautement fantaisiste de la science. La méfiance voire l'hostilité à l'égard de cette pratique spéculative fut légitimée par l'action de nombreux escrocs et mystificateurs qui tirèrent profit de la naïveté de ceux qui crurent, sans recul critique que le secret* maçonnique avait son origine et sa clef dans celui de la transmutation des métaux* le grand oeuvre (Magnum Opus). Le. cabinet de réflexion*, épreuve de la terre, constituerait alors la simple transposition de l'œuf philosophale où s'opérerait la phase première de la transmutation. Ce moment de putréfaction (putrefactio ou nigrido), symbolisé par squelettes ou corbeaux, correspond alors à cette mort symbolique que l'on retrouve dans l'initiation* maçonnique. Le passage au centre de la terre représenterait la « dissolution » du corps avant son nettoyage ou « désincrustation » par purifications successives, tout comme l'initié en maçonnerie subit, avant de recevoir la Lumière, les quatre épreuves de la terre, de l'air, de l'eau et du feu. L'engouement pour l'alchimie fut tel au XVIIIe siècle que les francs-maçons les plus mythiques furent souvent alchimistes. Ce fut le cas de l'étrange comte de Saint Germain ou de Dom Pernety, qui constitua les Illumines d'Avignon*. Paracelse lui-même, qui meurt en 1541, exercera une influence tardive au XVIIe siècle sur les énigmatiques Frères de la Rose-Croix*.
Si l'on veut bien dépasser l'image d'Epinal et la caricature, retenons que ce « souffleur » du Moyen Age, l'alchimiste, est d'abord un « cherchant ». La très mythique pierre philosophale n'est que l'un des aspects de cette doctrine hermétique fondée sur l'intuition d'une unité vitale cosmique, pensable par correspondances et analogies. Le grand oeuvre devient l'acte symbolique qui permet tout à la fois de régénérer, de renaître, de purifier l'être qui prétend à la connaissance suprême. Ce mouvement spéculatif* devint très vite une mystique dont la signification dépasse les manipulations opérées à partir des pierres, du feu ou des mentaux. D'ailleurs, les textes de Raymond Lulle ou de Fulcanelli usent de la métaphore, du symbole de l'anagramme voire d'alphabets inventés pour donner l'intuition que le sens transcende toujours le texte, que le lisible est au-delà du visible. Paracelse concevait une source mystérieuse du monde dont tout procède. Ce mysterium magnum contient tout virtuellement et, à partir de cet oeuf, de cette matrice, le passage à l'acte se déploie par des forces initiales qui constituent les éléments du monde: sulphur, mercunus et sal. Le principe premier se divisant en terre. eau, air et feu, éléments de la physique aristotélicienne. Certains aspects de la symbolique de l'alchimie peuvent être relevés dans les rituels maçonniques qui introduisent le profane dans une catharsis libératrice grâce à des voyages (peregrinatio) destinés à purifier, détacher, élever et promouvoir par la rencontre des quatre éléments. Chez Paracelse, la diversité, la multiplicité et la variété des êtres et des corps se comprend à partir de la combinaison et de la lutte de ces forces et de ces éléments, et la prédominance de telle force sur telle autre, d'un élément sur un autre, rend compte de la singularité de chaque objet crée. Tout provient donc de la même source objets inanimés, êtres grossiers, corps animés et conscients se transforment, les uns dans les autres, et dans chacun des corps se retrouve, selon des dosages variables, les trois éléments initiaux. Les francs-maçons utilisent bien certains symboles puisés dans l'imagier alchimique, mais il est loin d'être admis que tous se reconnaissent dans les significations hermétistes attribuées au soufre*, au sel* au mercure* ou au V.l.T.R.l.O.L.* (du cabinet de réflexion) par ces « souffleurs » de jadis. Il est clair aussi que la volonté de transmuter le plomb en or à fait rêver les puissants et fascine les naïfs. Paracelse d'ailleurs fut indifférent à ce projet légendaire; son but était plutôt de découvrir dans la nature les forces les plus cachées pour extraire l'esprit l'essence ou la teinture des matières premières à des fins médicales. On peut aussi comprendre ce projet dans une dimension initiatique: la pierre* brute symbolise comme le plomb de l'alchimie, l'homme ordinaire le profane à l'état brut que les divers moments de l'initiation guident vers une plus grande spiritualité représentée par l'or le plus fin.

Ce processus conduit l'initie d'un chaos subi à un ordre voulu. Ordo ab chao est d'ailleurs l'une des devises alchimiques reprise par le Rite Ecossais Ancien et Accepte*. Sur ce même registre initiatique, on peut également relever des points de convergence entre l'athanor fourneau de l'alchimiste destiné au grand oeuvre (le grand secret), où s'actualise l'union du sel, du soufre et du mercure, et la nature même du travail en loge destiné, grâce à une alchimie spirituelle, à favoriser le passage à la maîtrise. Il ne s'agit donc pas de tenter une transmutation des mentaux pour atteindre, à prix d'or, leur changement en or, mais de comprendre le mystère de l'univers tout en purifiant et en régénérant la personne. Dans ce sens, toutes les phases de l'opus alchymicum peuvent être interprétées non seulement comme des moments de décomposition et de recomposition de la matière mais aussi comme les étapes d'une expérience intime propre à l'initie qui par la souffrance et la mort va vers la renaissance ou la résurrection qui suit la transmutation. On reconnaît le «scénario» inhérent à toute initiation traditionnelle. Quant au secret alchimique il est certes dissimulé par un symbolisme complexe où se retrouvent la tradition astrologique et kabbaliste* et, à partir de la Renaissance, des croyances cosmiques, des images sexuelles, un bestiaire et une symbolique végétale Mais ces compositions ésotériques ne seraient en fait intelligibles que par l'adepte qui procède par étapes, en prenant soin de ne pas se précipiter vers ce « secret » qui lui demeurerait alors extérieur et étranger. On peut donc retrouver dans la franc-maçonnerie une suite d'opérations spirituelles et symboliques, inspirées pour certaines par l'imaginaire alchimique. Ce point fut particulièrement examine par Oswald Wirth* dans son ouvrage, publie à Paris en 1910, Le Symbolisme hermétique dans ses rapports avec l'alchimie et la franc-maçonnerie. L'alchimie n'a pas bouleversé la connaissance de la matière et elle à même pu constituer un obstacle animiste au mouvement du savoir. Son symbolisme est toutefois propre à faire rêver celui qui habite le monde en poète. Si la part du rêve est souvent vitale, la divagation est toujours morbide. On ne saurait confondre la franc-maçonnerie curieuse des mystères et symboles d'une tradition alchimique qui fit aussi rêver les surréalistes, avec des mouvements au syncrétisme douteux ou rose-croix et templiers se retrouvent pour tenter d'arracher leurs mystères aux chevaliers de Malte tout en prenant appui sur une numérologie de bazar ou sur les divagations de kabbalistes contemporains, toujours à la recherche du mot sacre.

Vl. B.
ALLEMAGNE
Allemagn.jpg - 221276,0 K La division du territoire germanique en États de tailles et d' importances diverses explique le développement morcelé et complexe de la franc-maçonnerie* allemande jusqu'en 1871. Entre 1730 et 1806, la première Grande Loge d'Angleterre nomme des Grands Maîtres Provinciaux au Hanovre, en Saxe à Hambourg en Westphalie, à Brunswick et à Francfort-sur-le-Main. La première loge* se constitue à Hambourg le 6 décembre 1737. Une délégation de ses membres initié le 15 août 1738 à Braunschweig (Brunswick) le prince héritier Frédéric* qui crée aussitôt sa propre loge dans son château de Rheinsberg aux environs de Potsdam puis, après son accession au trône, dans celui de Charlottenburg, près de Berlin, où il recevra son frère cadet, le prince August Wihelm (Hohenzollern*). à Berlin, la loge Aux Trois Globes fondée le 13 septembre 1740 prend le titre de Grande Mère Loge Nationale le 24 juin 1744.

Organisé en Lusace en 1751 par von Hund*, I'Ordre* de la Stricte Observance* prend son essor dès la guerre de Sept Ans terminée et s'installe à Prague (1763), Berlin (1764), Bayreuth, Brunswick Copenhague et Hambourg (1765), Francfort-sur-le-Main (1767), Bale (1768), Strasbourg et Zurich (1772), Lyon, Chambéry et Montpellier (1774), Nancy et Turin (1775). à de rares exceptions près, tout ce que l'Allemagne compte de maçons cultivés ou titrés appartient à cet Ordre qui s'éteint après le Convent* de Wilhelmsbad (1782).

Après une tentative infructueuse d'entrer en contact avec l'Angleterre en 1763, Zinnendorf *, ancien membre de la Stricte Observance, se tourne vers la Suède*, adopte les rituels que lui transmet Eckleff* et fonde en 1770 à Berlin la Grande Loge Nationale d'Allemagne. Celle-ci ne reconnaît pas les Constitutions d'Anderson* et se définit comme un Ordre chrétien dont l'histoire traditionnelle fait remonter l'origine de la franc-maçonnerie non aux tailleurs de pierre* du Moyen Age mais à des templiers réfugiés en Ecosse* après la mort de Jacques de Molay.

Allemag.jpg - 80423,0 K La loge Aux Trois Colombes, créée par des Français à Berlin en mai 1760 au sein de la mère loge* Aux Trois Globes, prend l'année suivante le nom de L'Amitié aux Trois Colombes puis celui de Royale York de l'Amitié apres avoir initié le 27 juillet 1765 le prince Edwards Augustus, duc d'York et d'Albany, frère du roi George III. Elle se constitue en Grande Loge de Prusse le 11 juin 1798 et ajoute à son nom « dite Royal York de l'Amitié » en 1845.

Cinq Grandes Loges se constituent au XlXe siècle: la Grande Loge de Hambourg, la Grande Loge Au Soleil à Bayreuth, et la Grande Loge de Saxe à Dresde en 1811; L'Union Éclectique à Francfort-sur-levain en 1823; la Grande Loge de La Concorde à Darmstadt en 1846. Le terme « humanitaire» ne leur à été applique qu'au début du XXe siècle. En 1872, elles fondent avec les trois Grandes Loges de Prusse l'Alliance Allemande des Grandes Loges. Les Grandes Loges de Prusse s'en retirent en 1922, prétextant que l'Alliance développe des tendances.«pacifistes et cosmopolites » Une neuvième obédience*, La Chaîne Fraternelle Allemande, fondée à Leipzig en 1924, rejoint l'Alliance et la quitte en 1926.

L'Alliance Maçonnique au Soleil Levant, créée à Bayreuth en 1907, connaît une scission en 1930. Une partie de ses membres parvient à fonder la Grande Loge Symbolique d'Allemagne le 26 juillet à Hambourg grâce à l'appui de deux membres du Suprême Conseil d'Allemagne, lui-même constitue le 10 février précédent, et s'établit à Berlin. Ces obédiences, considérées comme irrégulières en Allemagne, sont reconnues par plusieurs Grandes Loges et Suprêmes Conseils européens, mais non par leurs homologues de langue anglaise.

Au moment de l'avènement de Hitler, les effectifs de la maçonnerie allemande sont les suivants: Aux Trois Globes (fondée en 1744) 183 loges 21300 membres; Grande Loge Nationale (1770), 179, 20400; Royal York de l'Amitié (1798), 108 10600; Hambourg (1811), 54 ,5000; Bayreuth (1811), 42, 3 600; Dresde (1811), 46 6 500, Francfort (1823), 26, 3 000; Darmstadt (1846), 10, 900; Leipzig (1924), 10, 1 800; Au Soleil Levant (1907), 52, 2 000 (en 1927); Grande Loge Symbolique (1930), 24, 800.

La Grande Loge Symbolique, sous la direction de son Grand Maître Léo Muffelmann* est la seule Grande Loge allemande à adopter des positions résolument opposées au nazisme*. Elle est aussi la seule à se mettre spontanément en sommeil en mars 1933, alors que les Grandes Loges « humanitaires » se transforment en sociétés profanes et que les trois obédiences prussiennes abandonnent la dénomination de Grande Loge pour adopter celle d'Ordre germano chrétien transforment leurs rituels en éliminant tout élément vétéro-testamentaire et tentent de faire accepter leur existence par Hitler en étalant publiquement leurs sentiments ultra nationalistes et antisémites. Elles sont néanmoins dissoutes en juin 1935.

Une fois la Seconde Guerre mondiale terminée la franc-maçonnerie se réveille en Allemagne au mois de septembre 1945, dans un pays sépare en zones d'occupation militaire étanches, coupées de Berlin. En juin 1946, le Grand Maître de la Grande Loge de Bayreuth, Bernhard Beyer, exprime le vœu qu'aucune relation ne soit renouée avec les trois Grandes Loges de Prusse jusqu'a ce que celles-ci reconnaissent le tort qu'elles ont cause à la franc-maçonnerie. Néanmoins, la majorité des maçons allemands souhaite parvenir à créer une obédience unique.

Une première étape est atteinte avec la fondation de la Grande Loge Unie des Francs-Maçons d'Allemagne dont la création en 1949 doit tout aux efforts conjugues de son premier Grand Maître, Théo dor Vogel (1901-1977), un industriel de Schweinfurt, et de l'avocat August Pauls (1873-1956), Grand Commandeur du Suprême Conseil d'Allemagne. Elle rassemble 174 loges. 81 proviennent des Grandes Loges de Prusse (dont quatre seulement de la Grande Loge Nationale), 77 des Grandes Loges « humanitaires », 6 d'obédiences considérées comme irrégulières avant la guerre et 10 loges créées depuis 1945. Elle est installée à Francfort sur-le-Main le 19 juin 1949. Parmi les invités figure Louis Bonnard, Grand Maître du Grand Orient de France*. Les relations entre francs-maçons allemands et français, qui en 1949 ont suscite une discussion passionnée au Convent du Grand Orient de France, deviennent étroites après la visite à Paris en septembre 1951 du Grand Maître Vogel. Mais c'est également Vogel qui annonce au Grand Maître Francis Viaud, le 13 décembre 1952 à Offenburg, que ses relations doivent être rompues avec le Grand Orient de France en raison des pressions américaines.

La Grande Loge Nationale, qui à refuse d'entrer dans la nouvelle organisation unifiée, fonde à Berlin avec la Grande loge Aux Trois Globes le 29 avril 1952 l'Alliance des Grandes Loges Maçonniques Chrétiennes d'Allemagne. Deux de ses dignitaires, invités le 18 février 1954 à Londres, y sont fortement encouragés à adhérer à la Grande Loge Unie d'Allemagne. Les obédiences allemandes reprennent des pourparlers à Berlin en décembre 1954 et janvier 1955. La Grande Loge Nationale accepte alors, pour la première fois, de reconnaître dans une déclaration publique les graves erreurs qu'elle à commises entre les deux guerres et d'autoriser la visite de maçons de confessions « non chrétiennes » dans ses loges.

Pendant ce temps la Grande Loge Unie d'Allemagne à signe avec le Grand Orient des Pays-Bas*, les Grandes Loges de Suisse (Alpina*), du Luxembourg et de Vienne (Autriche) la Convention de Luxembourg (15 mai 1954) dont le but est d'améliorer «les relations entre les puissances maçonniques [qui] ne correspondent pas à l'idée d'une chaîne d'union mondiale », Des conversations entamées un an plus tard entre la Grande Loge de France* et la Grande Loge Nationale Française* aboutissent en septembre 1955 à la rédaction d'un projet de fusion. Ce projet échoue lorsque le Conseil Fédéral de la Grande Loge de France, après avoir pris connaissance de son texte décide de le retirer de l'ordre du jour du Convent du 14 janvier 1956. La Grande Loge de France est admise le 8 septembre suivant à la Convention de Luxembourg.

Les négociations interallemandes, rendues complexes lorsque la Grande Loge Nationale exige que la Grande Loge Aux Trois Globes y prenne part, deviennent impossibles apres l'adhésion de la Grande Loge Nationale, le 10 septembre 1956, au traite d'amitié conclu entre les quatre Grandes Loges scandinaves, en vertu duquel elle ne peut désormais signer d'accord national ou international sans l'approbation de ses partenaires. La Grande Loge Unie d'Angleterre* décide alors, sans en prévenir la Grande Loge de Suède, de reconnaître la Grande Loge Unie d'Allemagne le 5 décembre 1956, ce qui à pour conséquence d'isoler la Grande Loge Nationale.

Le 14 juin 1957 une conférence réunit à Londres les représentants des maçonneries allemande et scandinave. Elle porte ses fruits un an plus tard. Le 17 mai 1958, la Grande Loge Unie d'Allemagne et la Grande Loge Nationale ratifient la Magna Carta document qui définit les termes de leur union. Théodore Vogel devient le premier Grand Maître des Grandes Loges Unies d'Allemagne dirigées par un sénat où chacune des deux parties contractantes est représentée par quatre membres et deux suppléants.

La nouvelle obédience doit maintenant obtenir la reconnaissance* des Grandes Loges britanniques, reconnaissance qui ne va pas de soi en raison de la présence au sein de la Convention de Luxembourg de l'une des deux Grandes Loges allemandes et de la Grande Loge de France, irrégulière aux yeux des maçons britanniques. Le problème est mis à l'ordre du jour d'une nouvelle conférence qui réunit le 30 octobre 1959 à Londres les plus hauts dignitaires des Grandes Loges d'Angleterre d'Ecosse et d'lrlande*, le Grand Maître Adjoint Pinkerneil qui remplace Théodore Vogel malade, le Grand Maître Davidson et le frère Hofman pour les Pays-Bas. Afin d'être reconnues, les Grandes Loges Unies d'Allemagne rompent leurs relations avec la Grande Loge de France le 2 novembre 1960.

La Grande Loge Aux Trois Globes rejoint les Grandes Loges Unies d'Allemagne en mai 1963. Son adhésion et celles des Grandes Loges provinciales britannique et américaine canadienne situées sur le sol allemand rendent nécessaire une rédaction modifiée de la Magna Carta, ratifiée le 23 octobre 1970. Le nombre des membres du sénat passe de 10 à 11 l'ancienne Grande Loge de 1949 y à 5 représentants, I'ancienne Grande Loge Nationale 3, les 3 autres partenaires un chacun. De 1968 à 1980, des représentants de la franc-maçonnerie de langue allemande (Allemagne, Autriche et Suisse) ont poursuivi des négociations intermittentes et secrètes avec l'Eglise* catholique romaine dans le but de parvenir à un rapprochement. Elles se terminent sur un échec la conférence épiscopale allemande rappelant dans une déclaration unilatérale, rendue publique le 1e avril 1980, 1'incompatibilite de l'appartenance simultanée à l'Eglise catholique et à la franc-maçonnerie.

Dans le contexte d'un projet de confédération maçonnique européenne, imaginé en 1988 par la Grande Loge de France. celle-ci tente de renouer avec la maçonnerie allemande en 1989. Cette tentative est interrompue l'année suivante à la suite d'un avertissement adressé aux Grandes Loges Unies d'Allemagne par la Grande Loge Unie d'Angleterre. Une situation analogue se reproduit en 1994, à la suite de contacts officieux entre maçons allemands et français appartenant à des obédiences non reconnues.

A B
ALLEMANISME
Dresde.jpg - 52907,0 K Le mouvement allemaniste se constitue en 1890, quand l'ancien déporté Jean Allemane (1845-1923) se sépare des broussistes accuses de négliger la lutte révolutionnaire. Fondateur du Parti Ouvrier Socialiste Révolutionnaire (P.O.S.R.) et entre à la S.F.I.O. (1905), députe de Paris en 1901 et en 1906, il anime ce courant socialiste qui se caractérise par son ouvriérisme et son antimilitarisme. 11 ne rejoint la maçonnerie que tardivement, dans le prolongement de son activité au sein de la Libre Pensée* ou il collaborait avec des maçons, dont le prêtre défroque Victor Charbonnel. 11 entre, le 11 janvier 1905, à la Loge* Les Rénovateurs, parraine par son fils Charles.

Cependant, cet atelier, domine par la personnalité de Bertrand Sincholle un ancien joumaliste réfugié à Strasbourg apreS la défaite de la Commune* et vice- président du Conseil de l'Ordre en 1906 est un véritable foyer socialiste au sein duquel ses partisans sont nombreux. Auprès du Dr Meslier, du syndicaliste mineur Basly (initié le 20 novembre 1888), du radical Maurice Bertheaux on trouve en effet les allemanistes Jean-Baptiste Clement* (28 octobre 1898), Lassalle (24 novembre 1899) et Poulain (23 mars 1900), tous députes ou futurs députes. Cette loge réputée pour son anticléricalisme avec ses banquets gras du Vendredi saint, est également ouverte aux anarchistes avec les réceptions en 1900 de Mathias Paraf-Javal et d'Antonin Cyvoct.

Parmi les autres ateliers socialistes influences par les allemanistes, on peut citer la loge montmartroise La Ralson (fondée en 1898 par Sembat*), une loge ou l'on retrouve aussi des figures du socialisme comme Arthur Rozier Pierre Morel et Gustave Rouanet. Quant à Jean Allemane, il s'inscrit en 1906 à la loge Force et Matière et quitte le 5 octobre 1913 Les Rénovateurs.













A.C.
ALPINA
voir GRANDE LOGE SUISSE ALPINA

ALSACE-LORRAINE
I. Le problème de l´annexion dans les territoires concernes
II. La loge (1872-1921)

1. Le problème de l´annexion dans les territoires concernes
La franc-maçonnerie, bien implantée dans l'est de la France au milieu du XIXe siècle, enregistre un repli singulier entre la Seconde République et 1870. à cette date, on ne compte plus en Moselle que deux ateliers en activité: Les Amis de la Vente (Metz) et Les Vrais Amis (Sarreguemines). En Meurthe, I'Art Royal est pratique par la loge* Saint-Jean de Jerusalem, et par un atelier récent appelé Travail et liberté. Dans les Vosges, on ne compte cependant pas moins de cinq loges actives (La Fraternité Vosgienne à Epinal, Le Travail à Remiremont, L'Ègalité Vosgienne à Saint-Dié, Saint-Jean de la Paix à Neufchateau et L'Hammonie à Mirecourt) et six en Alsace (Les Frères Réunis à Strasbourg, La Fidélité à Colmar Espérance et Parfaite Harmonie à Mulhouse, Progrès à Sainte-Marie-aux-Mines, Tolérance et Fratemité à Belfort). Dans cette ville qui restera française apres 103 jours de siège, cette loge n'aura pas à se saborder.

Si les maçons français reprochent aux frères allemands leur antisémitisme, les loges mosellanes et alsaciennes entretiennent entre elles et avec les loges allemandes des relations fraternelles jusqu'en 1870. La guerre et la débâcle, suivies de l'annexion de l'Alsace et d'une partie de la Moselle, vont alors constituer, pour les Français, un formidable traumatisme. Toutes les loges alsaciennes et mosellanes décident de se saborder après la défaite, refusant de passer sous les fourches caudines de la maçonnerie allemande.

Les francs Maçons reprochent notamment alors à leurs frères allemands leur silence sur l annexion au mépris du droit et de la volonté des populations, la perte des loges françaises situées dans les nouveaux territoires du Reich et l'implantation dans ces derniers de loges nouvelles créées par l' occupant. C' est le cas des loges Zum Tempel des Friedens à Metz, An Erwins Dom à Strasbourg et Zur Treue à Colmar.

En contradiction avec l'universalisme maçonnique, de nombreux maçons français font notamment preuve d'un nationalisme ardent qui s'exprime parfois dans l'adhésion, pour un temps, aux thèses de la Ligue des Patriotes, voire du boulangisme* .

Si les contacts entre loges franc,aises et allemandes se multiplient en 1905, notamment entre des loges de Paris, Lyon et Strasbourg, la présence de frères allemands dans les loges de 1' Est reste de toute évidence plus délicate à organiser.

C'est seulement le 26 mai 1907 que les frères des loges de Strasbourg et de Colmar franchissent le seuil de la loge de Nancy présidée par Charles Bernardin*. Par la suite, les frères des différents pays se retrouvent successivement à Bale (1908), Baden-Baden (1909), Paris (1911), dans un contexte politique tendu par la crise d'Agadir, Luxembourg (1912) et La Haye (1913). Les rencontres sont interrompues avec l'annulation de celle de Francfort sur-le-Main prévue le 16 août 1914. Reprises en 1925, les réunions conduisent les frères des deux pays, lors de la célèbre rencontre de Verdun due aux efforts de Bernardin, à se rendre sur le champ de bataille de Douaumont afin d'y renouveler le serment de la Schlucht. En 1929, c'est à Mannheim que la rencontre eut lieu, puis à Besançon en 1930. Afin d'éviter les persécutions du nazisme* aux frères allemands la rencontre prévue en 1933 à Paris fut reportée et il fallut attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour que le problème des relations maçonniques franco-allemandes fut à nouveau à l'ordre du jour.

Les trois Grandes Loges allemandes, qui ne se sont pas sabordées mais « reformées », disent se séparer et briser complètement tous les liens qui peuvent encore exister entre elles et des associations maçonniques quelconques. Elles exigent de tous leurs membres qu'ils soient de race allemande, et répudient les mots mêmes de « franc-maçon » et de « Loge ».

Au côte de Bernardin, on ne saurait oublier le rôle joue par des maçons tels que Junck, vénérable de la loge de Luxembourg, Quartier-la-Tente, l'artisan de la reconstruction du Bureau international de la Paix, et les Allemands Riess et Kraft, respectivement vénérables des loges Zur Treue de Colmar et An Erwins Dom de Strasbourg.

J.CI. C.
II. La loge (1872-1921)
Alsac.jpg - 72512,0 K Après la défaite de 1871, les huit ateliers d'Alsace-Lorraine sont menaces. Le vénérable des Frères Unis* à Strasbourg les convoque, le 2 juillet 1871, en vue de créer une Grande Loge pour l'Alsace-Lorraine. La tentative échoue et les loges des provinces perdues sont sommées, le 2 août 1872, de rompre avec le Grand Orient* et de rejoindre une des obédiences* germaniques. Elles préfèrent se saborder.

Les maçons qui décident de s'expatrier pour rester français ouvrent, au début du Convent* du Grand Orient, le 8 septembre 1872, la loge Alsace-Lorraine. Le négociant Gustave Dalsace, président de La Bienfaisance israélite, tient, en l'absence du députe Bamberger, le premier maillet. Dés sa première séance, l'atelier initie des profanes de qualité tels le valeureux défenseur de Strasbourg, Edmond Valentin, ou le banquier Charles Goudchaux. La loge débat « des moyens les plus propices à entretenir des relations avec les compatriotes d'Alsace-Lorraine», lance un appel pour le financement d'une école sous couvert de l'Association générale d'Alsace-Lorraine fondée en juin 1871, pour apporter aide et protection aux émigres, sans distinction d'opinions politiques ou religieuses. Cette association procure ces emplois. obtient des bourses et place dans des écoles les enfants des réfugies dont beaucoup ne parlent que le dialecte régional Trois des cinq membres de son comité directeur (Lauth, Seinguerlet et Vacca ) appartiennent à la loge.

Elle regroupe 153 membres en 1878 ' Parmi eux, le sculpteur Auguste Bartholdi*, des publicistes (Chatrian et Erckmann, Alfred Collignon, Hector Depasse et Gustave Naquet), les députes Edouard Bamberger, Jules Ferry* et Pierre Marmottan, le sénateur Edmond Valentin, les conseillers municipaux Germer-Bailliére Henri Harant, Jobbe-Duval Charles Lauth et Henri Thuhe, futur président du Conseil de l'Ordre, le gérant du National Edouard Veil, Jean Macé*, le lieutenant du génie Joseph Joffre. Elle est alors la loge la plus brillante et la plus recherchée du Grand Orient. Sur le tableau de 1883 apparaissent les noms d'Edmond Benoît-Lévy, de Théodore Reinach, du banquier Jules Vidal-Naquet. En 1888, elle initie Savorgnan de Brazza, commissaire de la République au Congo (parraine par Colfavru*) et Lucien Klotz futur ministre de Clemenceau en 1894 elle affilie encore Léon Bourgeois*. La loge demande l'autorisation de centraliser la propagande en faveur du projet d'éducation civile et militaire émis par la Lique de l'Enseignement et de correspondre à cet effet avec toutes les loges de tOUte5 les obédiences. En 1882, elle diffuse une circulaire en faveur de l'CEuvre du développement civique et militaire de la jeunesse française reprenant une initiative du frère George, sénateur des Vosges, qui l'avait soumise à la Ligue de I'Enseignement. Le Conseil de l'Ordre, l'année suivante, autorise la constitution d'un comité de propagande maçonnique en faveur de cette oeuvre.

L'atelier va rapidement être considéré comme un conservatoire des valeurs patriotiques et, en 1900, il se situe maintenant sur la « droite » du Grand Orient « doumeriste», contestant l'Affaire des fiches* (d'où le retrait de Brazza). 11 ne peut empêcher, dans le cadre du rapprochement des maçonneries françaises et allemandes, que la page réservée aux défuntes loges d'Alsace-Lorraine soit retirée de l'Annuaire de l'obédience. Avec les débuts de la guerre c'est le temps des actes. Un de ses vétérans, Henri Albert Collignon, engage volontaire à 58 ans en 1914, secrétaire général de la présidence de la République est tue au front en 1915. Apres la victoire, en 1921, son titre distinctif ne se justifiant plus, il adopte celui de Persévérance qu'il porte toujours aujourd'hui.

A. C.
AMIS DE LA LIBERTE
(Les) Cette loge, l'une des plus remarquables de la capitale pendant la période révolutionnaire avec Le Centre des Amis*, est fondée à Paris le 30 juillet 1790 et installée le 6 décembre 1790 entre autres par celui qui sera l'homme clef de la fondation et de la survie des «ateliers révolutionnaires » parisiens, le docteur Gerbier (1727-1794). Écuyer, médecin de Monsieur. Humbert Gerbier, membre de l'ancienne Grande Loge* (il est affilie à la loge Saint Jean de la Parfaite Unité'), est en 1790 une figure importante de la maçonnerie puisqu'il fut non seulement l'installateur de la loge de Saint-Brieuc La Vertu Triomphante, et le fondateur d'une loge parisienne, Saint-François des Amis réunis (1785), mais aussi l'un des fidèles de Chaillon de Jonville, le Substitut Particulier du Grand Maître le comte de Clermont. à ce titre, il fut un acteur important des assemblées constitutives du Grand Orient* en 1773 (il devient expert de la chambre d'administration du nouveau Grand Orient) et de celles qui virent la prise en main des hauts grades* par le Grand Chapitre Général dont il est membre. La loge qu'il installe compte alors dix maîtres* parisiens et un compagnon*. Sept frères vont activer la loge jusqu'en 1793: le docteur Mercadier, les Griois père (argentier de la vennerie du roi) et fils (officier de la Garde nationale parisienne), Cousineau (luthier), Chardiny (membre de l'Académie royale de musique), Vincent (commissaire à l'extraordinaire) et le négociant Duranton.

L'atelier est en relation avec la loge L'Âge d'Or (un atelier fonde en 1790), Saint Louis de la Martinique et, à partir de 1793, Le Centre des Amis. Les conditions d ' existence deviennent rapidement difficiles et le tableau* de loge, dûment timbre et signe en 1790, ne comporte plus aucune signature en 1793. Les lieu et date de naissance des membres ainsi que l'adresse de la loge n'apparaissent plus. Deux planches, datees de janvier et de mars 1794, attestent pourtant encore d'une activité. 11 est vrai que les membres de l'atelier reçoivent le message républicain et entendent le faire passer en franc-maçonnerie. Au début de janvier 1794, la loge propose, en effet, un plan original destine à adapter les usages consacres de la franc-maçonnerie aux usages républicains. Les frères entendent conformer la morale et les principes maçonniques à ceux de l'égalite de la fraternité, de l'unité et de l'indivisibilité prônés par les nouvelles lois républicaines. Ainsi, ils proposent un règlement dont les points principaux sont: appliquer sur la porte extérieure du local l'affiche domiciliaire adoptée par la République française; poser dans l'intérieur du temple* au-dessus du vénérable* à l'orient un étendard aux trois couleurs nationales, surmonte du bonnet de la liberté remplacer le « vous» par le « tu » et le « toi »; appeler le profane présent à l'initiation « citoyen » ou « citoyen candidat »; faire prêter le serment ou obligation sur un tableau des droits de l'homme qui est le seul évangile de la raison et de la philosophie; ne plus admettre, dans les travaux, de cordons ni décors portes en bandoulière; on y suppléera par un cordon aux couleurs nationales, mis en sautoir*, au bout duquel sera attache le bijou* du grade* qu'on remplira pendant les travaux-le bijou sera attache à la boutonnière par une rosette aux mêmes couleurs.

La proposition est faite aux frères du Centre des Amis. La Terreur passée, on reste cependant discret car les frères du Centre des Amis et des Amis de la Liberté vivent dans une suspicion qui prévaut à leur en contre. On doit en effet innocenter la maçonnerie des accusations infondées de complot. Dans ce contexte, le; loges révolutionnaires se recomposent donc difficilement et les Amis de la Liberté' optent pour la stratégie de la fusion des forces, à l'initiative de Mercadier qui veut s'unir aux Frères Réunis de la Martinique et dont il s'est rapproche durant les aimées noires. La loge à eu en effet des réunions très espacées à compter de février-mars 1794 avant la reprise des travaux en octobre. Mercadier, le Secrétaire Général, expose implicitement, dans la lettre qu'il écrit le 18 octobre pour remercier les membres du Centre des Amis de lui avoir adresse une planche dans le courant de mai 1794, dans laquelle les frères approuvaient le plan présenté par les Amis de la Liberté, la position dominante: il souhaite que l'union et l'amitié fraternelle qui règnent entre les deux ateliers et celui des Frères Réunis de la Martinique permettent à la maçonnerie française de reprendre sans contredit un nouvel ordre d' institution dont le but sera toujours le bonheur et la félicite de l'homme en société, toutes les fois que ses actions seront dirigées par les moeurs et les vertus maçonniques.

Le 21 décembre 1796, Les Amis de la Liberté' font une demande pour la fondation d'une loge du Point Parfait réunissant les forces de deux ateliers. Certains points restent obscurs: ainsi, un autre (?) Point Parfait aurait existe depuis 1793, et peut- être depuis 1790 (tableau de 1823), et l'accord entre les loges est l'objet de deux versions, l'une en faveur de la titulature Le Point Parfait et l'autre les Amis de la Liberté' et des Frères de la Martinique Réunis. 11 est certain en tout CES que l'histoire des premiers Amis de la Liberté se noie dans celle de la fusion des deux ateliers, même si certains de ses membres. comme Mercadier. présent dans la loge du Point Parfait en 1813 (il à plus de 80 ans), restent des maçons très actifs.