Partie 2
L'INFLUENCE DE LA FRANC-MACONNERIE SUR LA SOCIETE FRANCAISE

 

Nous avons décomposé la deuxième partie du dossier en deux chapitres.

Le premier traite de l'importance politique de la franc-maçonnerie depuis sa création à nos jours. Nous avons suivi le déroulement chronologique, c'est-à-dire de la période révolutionnaire à nos jours.

Puis, nous montrerons l'importance sociale des francs-maçons. La deuxième partie traitera de l'influence maçonnique sur le déroulement de la Révolution. Grâce aux études de rituels maçonniques, nous démontrerons que les francs-maçons au cours de la période qui suit la Révolution jusqu'à notre cinquième République actuelle.

Enfin, nous essaierons de prouver qu'il existe un rapport entre les travaux de loge et les lois sociales, nous avons été limité dans cette comparaison à la période de 1900 à 1973, faute de documents complémentaires.

A. L'INFLUENCE POLITIQUE

1. De 1720 à 1799

La Révolution a-t-elle été influencée par les idées maçonniques, c'est ce que nous tenterons de démontrer dans la deuxième partie.

Certains maçons étaient membres du club Breton qui deviendra le club des Jacobins, celui-ci fut le moteur essentiel de la diffusion des idées révolutionnaires.

Au sein de la franc-maçonnerie, cohabitaient des députés membres du Tiers-Etat, du Clergé et de la Noblesse; ce qui pût être un facteur favorisant leurs rencontres, leurs relations et leurs activités.

Dans la composition des Etats-Généraux, il y eux de nombreux députés maçons de toutes origines. On observe que la séparation du club des Jacobins en Cordeliers, Brissottins et Jacobins regroupe les trois grandes tendances maçonniques de l'époque.

La Révolution a perturbé les loges, en 1791, les travaux cessent, à la même époque, le gouvernement révolutionnaire exige la fermeture des loges, celle-ci durera jusqu'en 1795. Les francs-maçons perdent leur grand maître Philippe d'Orléans qui reniera la franc-maçonnerie.

De nombreux francs-maçons sont emprisonnés ou exilés, ce qui ne sera qu'après la révolte de Thermidor que les francs-maçons seront libérés.

Sous le Directoire, les loges se reconstituent, des émigrés espèrent profiter de la solidarité maçonnique pour revenir en France. Les critères de choix des profanes s'orientent, de préférence, vers des personnes influentes.

Jusqu'en 1799, l'ordre tente de se réorganiser.

2. L'Empire et la restauration du régime monarchique

Après 1793, la franc-maçonnerie a changé, en effet, les opportunistes veulent se servir de l'ordre à des fins carriéristes. Durant le premier Empire, les franc-maçonnes seront très influents. L'entourage de Napoléon Bonaparte est essentiellement composé de francs-maçons.

Son grand-père, son père, ses frères ses plus proches collaborateurs tels Cambacérès, le créateur du code civil, et même sa femme Joséphine de Beauharnais étaient membres de loges. L'appartenance de Napoléon Ier à la franc-maçonnerie est encore discutée.

On peut cependant affirmer que Napoléon Ier a transformé la franc-maçonnerie, son esprit plus exactement. La franc-maçonnerie qui était une société initiatique, est devenue une société domestiquée au service de son pouvoir dont l'activité fut limitée à la pratique d'une charité et à la glorification de sa personne. Cependant, il existât de rares loges d'opposition dont la plupart des membres furent arrêtés au premier discours anti-napoléonien.

Napoléon Ier fait de la franc-maçonnerie une association surveillée par la police de Fouché, bien que celui-ci fut lui-même franc-maçon. Fouché introduisit des espions dans les loges. L'empereur est méfiant vis-à-vis des francs-maçons car il a peur d'un dépassement de pouvoir même si c'est son frère, Joseph Bonaparte, qui est le grand maître de l'ordre depuis 1804.

A la même époque, la grande loge Ecossaise dont le grand maître est Louis Bonaparte refuse de fusionner avec le Grand Orient de France.

Les loges sont composée de jacobins, de royalistes et d'impérialistes; il y a très peu de véritables symbolistes. Il n'y a plus que certaines loges qui pratiquent encore des travaux maçonniques et respectent la régularité des rites. Un fait anecdotique de la maçonnerie impériale est la "bataille des frères de Waterloo" où tous les grands généraux étaient maçons: Wellington, Wellesley, Blucher, Ney, Grouchy, Cambronne.

Sous la Restauration, la situation va se modifier pour la franc-maçonnerie. L'ordre reconnaît Louis XVIII et continue à servir le pouvoir.

Louis XVIII et Charles X n'ont rient contre la franc-maçonnerie mais ils veulent que celle-ci retrouve ses fonctions d'avant 1789. Beaucoup de loges disparaissent, les Bonapartes ne sont plus grands maîtres.

Une partie de la maçonnerie d'Empire se réunit dans les partis anti-monarchiques comme les Carbonari mais c'est un échec. La pape Pie VII condamne de nouveau les loges, il essaie surtout d'interdire le carbonarisme. Beaucoup de gens ont à l'esprit la peur du complot maçonnique.

Des loges sont gangrenées par la politique, on passe d'une maçonnerie au service du pouvoir impérial à une maçonnerie au service de la monarchie constitutionnelle, elle a complètement perdu l'idéal de société initiatique.

La grand maîtrise est vacante, les francs-maçons carriéristes se battent pour le pouvoir maçonnique qui permet le pouvoir profane.

Sous la monarchie de juillet, Louis-Philippe n'intervient pas dans la franc-maçonnerie qui le soutient. Mais cet appui commence à s'effriter car on se rend comte que la monarchie constitutionnelle est un échec. L'ordre s'oriente vers le parti républicain.

La franc-maçonnerie est entraînée par le frère La Fayette qui symbolise la République. Louis-Philippe commence à s'opposer à cette franc-maçonnerie qui lui a permis l'accès au pouvoir. Certains dignitaires maçons protestent en 1837 contre la politisation excessive des loges.

En 1848, se crée la Grand Loge Nationale de France. La montée républicaine dans les loges va permettre de sauver la franc-maçonnerie trop compromise par la monarchie.

C'est cette franc-maçonnerie qui dominera le second Empire. Pendant cette période, l'ordre est ouvertement anticlérical. Le signe de détresse des francs-maçons sera utilisé par les radicaux pour rallier les francs-maçons et ainsi triompher aux élections de 1848. Le radicalisme maçon triomphe dans Paris. En 1851, le gouvernement interdit les réunions de la Grande Loge Nationale de France, on la trouve par trop républicaine.

Louis-Napoléon Bonaparte qui a pris le pouvoir après le coup d'état de 1848 et s'est fait nommer Napoléon III, s'allie avec l'Eglise, ce qui va provoquer la suspension des réunions du Grand Orient de France et la dissolution de nombreuses loges. La plupart des réunions sont interdites par la police.

La franc-maçonnerie "secrète" car interdite continue ses activités, elle est en majorité composée par des socialistes révolutionnaires. Magnan est grand maître; l'Eglise française en 1861 permet l'enterrement de Magnan avec ses insignes maçonniques, ce qui va raviver la tension entre l'Eglise de France et le Vatican.

En 1865, l'ordre défend aux francs-maçons de s'occuper de politique, c'est une tentative de dépolitisation des loges. L'arrivée des radicaux au pouvoir et surtout l'élection du frère Gambetta va faire réintégrer les avant-postes politiques aux francs-maçons.

3. De 1870 à nos jours

Les défaites de 1870 provoquent la chute de l'Empire, c'est l'avènement de la troisième République.

Le gouvernement de Gambetta sera composé de nombreux maçons, le recrutement des politiciens maçons s'effectuera dans la petite bourgeoisie qui jusque là avait toujours été spoliée du pouvoir.

Lors de la Commune en 1871, les loges seront ouvertes au public, il y a deux franc-maçonneries distinctes: l'une rallie le gouvernement de Thiers, même s'il n'est pas maçon, c'est ce qu'on appelle la franc-maçonnerie d'ordre et il existe une franc-maçonnerie révolutionnaire qui appuie les Communards. En avril 1871, se déclenche la guerre civile. De nombreuses délégations de maçons, agissant publiquement en tant que maçons, vont essayer d'influencer la politique de Thiers. Il ne les écoutera pas.

Des loges, sans l'accord des dignitaires, vont aller s'exposer sur les barricades en compagnie de Communards qui leur offriront le drapeau rouge de la Commune. Le Grand Orient de France refuse cette "exhibition" mais les francs-maçons vont défiler publiquement. Les frères ralliés aux Communards menacent de se soulever si les Versaillais, les soldats de Thiers, tirent sur la foule. Thiers se moque des maçons, il veut la fin de l'insurrection. La franc-maçonnerie sera définie comme socialiste et communarde à cause de quelques loges parisiennes dont l'activité n'est même pas reconnue par les dignitaires de l'ordre.

Thiers sort vainqueur de l'insurrection, il décide de fermer les loges. Les francs-maçons compromis sont fusillés ou déportés.

L'ordre, en 1871, n'a ni réelle doctrine ni programme politique, il est désorienté et menacé. Cependant, on retrouve de nombreux maçons dispersés dans tous les partis politiques, surtout dans les mouvements patriotiques et ils sont animés d'un esprit de revanche.

Le Grand Orient de France décide d'interdire les actions politiques qui sont une menace pour l'ordre que les catholiques et les royalistes essaient de réprimer.

En 1881, Gambetta est au pouvoir, les francs-maçons ne quitteront plus les coulisses du pouvoir. en 1885, le Grand Orient de France précise que les francs-maçons ont le droit de faire de la politique mais ils ne peuvent y mêler l'ordre. De 1885 à 1902, on relie la franc-maçonnerie au radicalisme. En 1885, s'établit la Grande Loge Symbolique Ecossaise qui deviendra la Grande Loge de France.

La franc-maçonnerie devient un lieu de rencontres pour carriéristes, elle sera utilisée par le boulangisme, ce qui fera persévérer l'idée de complot permanent préparé par des francs-maçons.

Léon XIII condamne violemment la franc-maçonnerie. Les officiers militaires n'ont plus le droit d'être maçon.

De 1890 à 1900, la franc-maçonnerie sera dénoncée de toutes parts; surtout par Léo Taxil, ancien apprenti maçon chassé de sa loge. Celui-ci affirmera que la franc-maçonnerie est l'oeuvre du Diable, preuves, fondées de toutes pièces, à l'appui, ce ne sera qu'au début du siècle qu'il dévoilera sa supercherie mais beaucoup de gens garderont à l'esprit l'image du franc-maçon diabolique.

Des francs-maçons ne quittent plus le pouvoir, ils agissent en tant que maçon jusqu'en 1902 où on voit l'avènement d'un régime de droite soutenu par l'Eglise.

L'appui de la franc-maçonnerie au capitaine Dreyfus lors de l'affaire renforcera encore la crainte d'un complot judéo-maçonnique.

De 1910 à 1934, les gouvernements se succèdent, on retrouve toujours aux postes de direction des maçons influents. A partir de 1934, les francs-maçons sont de plus en plus accusés d'être des comploteurs, surtout après l'affaire Stavisky où étaient mêlés quelques frères.

La franc-maçonnerie est alors essentiellement composée de cadres moyens, de commerçants, de fonctionnaires et d'employés. On conserve de cette époque, l'image de l'instituteur laïque et franc-maçon.

Après la guerre de 1914-1918, on a une maçonnerie essentiellement de gauche, mais la quatrième Internationale de 1922 interdit l'appartenance des communistes à la franc-maçonnerie. Cela va provoquer le ralliement des Francs-maçons Frossard, Lussy et Gelis à la SFIO bien qu'ils furent les pères fondateurs du parti communiste français mais ils étaient avant tout Franc-maçon.

L'union des gauches se fera en 1924 grâce à l'aide de la Franc-maçonnerie. La montée du fascisme en France sera stoppée sous l'influence des maçons.

Durant la seconde guerre mondiale, même s'il y eut quelques Francs-maçons au pouvoir comme Peyrouton et Langeron, l'ordre va souffrir de la répression. En 1940, le Grand Orient de France et la Grande Loge de France sont dissous, en 1941, toutes les obédiences sont supprimées.

Des francs-maçons seront déportés. Après la guerre la franc-maçonnerie est complètement désorganisée, les frères ne réintégreront que tardivement les postes de pouvoir de la quatrième République. Ce n'est qu'en 1954, avec le gouvernement René Coty, puis en 1956, avec celui de Guy Mollet qui est un franc-maçon, dirigé par Pierre Mendès-France, un ancien maçon, que les francs-maçons carriéristes peuvent espérer retrouver l'influence d'avant 1939.

Durant la cinquième République se poursuivra la lente réorganisation de l'ordre. De Gaulle se moque des francs-maçons même si c'est lui qui a permis, en 1943, la réouverture des loges. Les francs-maçons sont dispersés dans tous les partis.

En 1960, la police surveille les réunions de l'ordre. Jacques Mitterrand est élu grand maître.

Les maçons sont des cadres moyens, des fonctionnaires, il existe chez eux une forte tendance socialiste.

On retrouve des francs-maçons dans les conseils municipaux et les conseils généraux.

On suppose que certains francs-maçons ont aidé François Mitterrand dans sa tentative, réussie, de main mise sur son parti.

La franc-maçonnerie conserve son esprit d'ouverture en invitant à des tenus blanches Valéry Giscard d'Estaing, celui-ci aurait d'ailleurs sollicité son entrée en loge. 


{Travaux.}
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Sortie du Temple.
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